La processionnaire du chêne

(Thaumetopoea processionea)


(Linnaeus, 1758) est un ravageur de l’ordre des lépidoptères, connu comme l’un des principaux insectes défoliateurs des chênes  européens,  ainsi  que  pour  ses longues  processions de chenilles urticantes. 


Native de régions chaudes, la processionnaire du chêne est commune en Europe centrale et méridionale jusqu’en Turquie. 


En Suisse, cette espèce est principalement présente dans le bassin lémanique, la vallée du Rhône, l’arc jurassien, la région bâloise, aux Grisons, ainsi qu’au sud des Alpes.

En Europe, Thaumetopoea processionea se développe sur les chênes et plus particulièrement le chêne pédonculé  (Quercus robur), le chêne sessile (Quercus petraea) et le chêne ubescent (Quercus pubescens). Cette processionnaire attaque les chênes qu’ils soient isolés, intercalés dans une haie ou groupés dans la forêt. Toutefois, en cas de fortes ullulations, la chenille peut se retrouver également sur d’autres essences telles que le charme, le bouleau, le hêtre, le noisetier ou encore le châtaignier.


Aspects des dégâts au chêne

La processionnaire du chêne est responsable d’importants dégâts sur les arbres attaqués, sans toutefois être directement responsable de leur mort. L’activité des chenilles du débourrement des chênes jusqu’en juillet occasionne la défoliation des deux pousses annuelles de l’arbre et de ses inflorescences (photo 1). Néanmoins, une défoliation totale ne provoque pas la mort de l’arbre, mais son affaiblissement conduit fréquemment à des attaques secondaires d’insectes xylophages (scolytes, agriles, capricornes, etc.).


Biologie et épidémiologie

La processionnaire du chêne peut pulluler une à trois années de suite, ce qui se caractérise par une progression croissante de la population. Les papillons des processionnaires du chêne sont nocturnes, ne s’alimentent pas et présentent un net dimorphisme sexuel (photo 2). Les femelles avec une envergure de 35 à 45 mm sont plus grandes et plus volumineuses que les mâles (25-30 mm). Leur envol est très bref de fin juillet à mi-août et la durée de vie du papillon est de quelques jours. Après l’accouplement, la femelle dépose entre 30 et 300 œufs groupés sur une branche fine en haut d’un arbre bien dégagé où ils passeront l’hiver (photo 3). Au printemps et avant le débourrement, les œufs éclosent.

La jeune chenille est jaunâtre avec une ligne longitudinale plus foncée sur le dos, tandis que la chenille adulte a une large bande dorsale noire bordée de part et d’autre par de larges bandes grises mouchetées de blanc et une partie ventrale gris-jaunâtre (photo 4). La durée de développement des chenilles varie entre 2 et 3 mois en fonction de la nourriture disponible. Les chenilles vivent en groupe et se déplacent ensemble en procession le long du tronc (photo 5). Au crépuscule, elles se dirigent vers les extrémités des rameaux afin de se nourrir des feuilles de l’arbre avant de retrouver au lever du jour, leur fin cocon.

Entre mars-avril et mi-juin, les chenilles passent par 6 stades larvaires (L1 à L6). Entre chaque mue (photo 6), les chenilles tissent un cocon de toile fine où elles s’y abritent durant la journée (photo 7). C’est au troisième stade larvaire à la fin mai, que les chenilles développent leurs microscopiques poils urticants et toxiques responsables de graves problèmes de santé publique. La fin du cinquième stade larvaire apparait généralement à partir du mois de juin, et les chenilles sont alors recouvertes de longs poils grisâtres. A ce stade, le nid tissé est plus résistant, plus grand (30 cm à 1 mètre de hauteur) et plaqué contre le tronc ou à l’aisselle d’une branche. C’est à l’intérieur de ce nid que les chenilles se réfugient dans une chrysalide rouge brune (12 mm sur 4 mm de large), afin de débuter leur nymphose. A partir de fin juillet, les premiers adultes apparaissent et le vol nuptial débute.

Impacts sur la santé humaine

Outre la dépréciation de l’aspect ornemental des arbres, la processionnaire du chêne pose un réel problème de santé publique dû aux micro-poils urticants que possèdent les chenilles. Le contact direct ou indirect de ces poils peut occasionner chez l’homme et chez les animaux des réactions allergiques graves caractérisées par des problèmes respiratoires et de sévères irritations de la peau. 

À partir du troisième stade larvaire, la chenille possède de petites poches sur la face dorsale libérant des milliers de poils microscopiques urticants lorsqu’elle est inquiétée. Ces derniers, très légers, sont transportés par le vent et s’accrochent dans les muqueuses et sur la peau, provoquant d’importantes démangeaisons et des troubles parfois graves. Les poils urticants conservent leurs propriétés plusieurs années après la disparition des chenilles, à l’abri dans les nids.  


Moyens de lutte

Les nids abandonnés ou encore occupés peuvent être retirés manuellement en automne avant d’être soigneusement brulés. Cette intervention délicate nécessite une bonne protection avec un équipement adapté et une sécurisation du secteur. Il est possible également d’utiliser des pièges à phéromones sexuelles qui accrochés dans le houppier de mai à septembre attirent les papillons mâles, les piègent et les noient dans un entonnoir.

La lutte microbiologique est à privilégier et des préparations à base de Bacillus thuringiensis var. kurstaki sont disponibles dans le commerce. Elles présentent l’avantage de l’innocuité vis-à-vis de la majorité des espèces non ciblées et une efficacité comparable à la lutte chimique. Ce biopesticide s’applique après le débourrement des chênes, au moment où les chenilles se nourrissent (entre les stades L1 et L3), permettant ainsi l’ingestion d’une toxine bloquant la nutrition. L’installation de nichoirs à mésanges friandes de chenilles peut venir compléter la lutte biologique.

La lutte chimique repose sur l’emploi d’insecticides perturbant le processus de mue, mais sans arrêter l’alimentation. Il s’agit généralement de substances de la famille des benzoylurées agissant par contact, non sélectif, à employer sur les jeunes chenilles (stades L1 à L3). Ce type de traitement est à réserver aux interventions de faible ampleur ou de rattrapage éventuel.

Hepia chenille processionnaire du chêne
Hepia
Auteurs: Pelleteret P., Bovigny P.-Y. et Lefort. F.
Institut Terre Nature et Environnement (inTNE)
Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture,
© hepia copyright 2014
Hepia

Mai 2014 - Tiré du site du canton de Genève http://ge.ch/nature/actualite 

 http://ge.ch/nature/media/nature/files/fichiers/documents/processionaire_du_chene.pdf